L’enseigne britannique New Look a annoncé la semaine dernière avoir décidé de céder la partie française de son activité. Celle-ci représente actuellement environ 50 millions d’euros de chiffre d’affaires et 400 salariés. Mayday a rencontré Paul-Henri Cécillon, Président Fondateur de Phinancia, société dédiée au management de crise, qui pilote cette restructuration. L’occasion d’évoquer avec lui les difficultés structurelles qui impactent les secteurs du retail et du textile.
Mayday : New Look a annoncé la cession de son activité en France. Ou en est l’enseigne britannique et quel est son projet ?
Paul-Henri Cécillon : En effet, j’ai annoncé au comité d’entreprise en fin de semaine dernière que nous avions lancé un processus de recherche d’investisseurs pour que New Look n’opère plus lui-même en France. New Look doit faire face à un marché complexe qui connait un fort recul des ventes. Dans ce contexte, le groupe a restructuré sa dette LBO afin de se désendetter et se recentrer sur son marché domestique britannique.
Mayday : Le Brexit a-t-il influencé cette décision ?
PHC : Le Brexit n’est pas à l’origine de la crise et n’influence pas la stratégie de l’entreprise. Cela étant, l’ensemble de la marchandise est localisé en Angleterre, donc tout ce qui aura un impact consistant à alourdir les échanges entre la France et l’Angleterre est de nature à complexifier les rapports.
Mayday : En tant qu’acteur du retail, pourriez-vous nous dire comment vous avez ressenti l’impact des Gilets Jaune ?
PHC : Tout le secteur du retail a ressenti l’impact des Gilets Jaune. Des villes souffrent plus que d’autres, car elles sont plus ou moins impactées. Cela provoque nécessairement une baisse immédiate du chiffre d’affaires, avec des charges fixes qui ne baissent pas. De fait, cela a créé un effet de ciseaux particulièrement négatif sur 3 mois.
Plus globalement, le secteur du retail a connu de beaux jours dans les années 2000. Les rendements étaient élevés dans un environnement peu concurrentiel et non digitalisé. Depuis une dizaine d’années, le marché du textile et du prêt à porter féminin s’est restreint et a baissé en valeur et en volume. A cela s’ajoute l’émergence de concurrents qui sont arrivés en force sur le masse market avec des acteurs tels que Primark ou sur des marques un peu plus haut de gamme. Il y a eu un bouleversement fort avec des acteurs qui ont beaucoup souffert.
L’autre élément est le moindre attrait des consommatrices pour l’achat de vêtements. Le pouvoir d’achat se distribue autrement. Le poids de la communication et des loisirs est beaucoup plus fort qu’il ne l’était auparavant. La part consacrée à l’habillement baisse. Aujourd’hui, il faut savoir que les françaises dépensent environ annuellement 330 euros en achat de vêtements, alors que c’était 400 euros il y a dix ans. Compte tenu de l’inflation, le panier moyen devrait se situer autour de 500 euros. Cela s’explique par un marché saturé : le marché du textile est un marché de renouvellement et non pas de développement.
Enfin, évidemment internet a bouleversé l’ordre établi. Aujourd’hui 18% des achats se font en ligne. Les visiteurs dans les commerces sont ainsi moins nombreux ce qui fait souffrir des centres villes et des centres commerciaux. En conséquence, les batailles entre bailleurs et preneurs sont vives, car les couts d’exploitation sont trop forts.
Mayday : Concernant l’entité française de New Look, quels sont les repreneurs envisagés ?
PHC : Concernant New Look France, une banque d’affaires a été mandatée. Le réseau est en excellent état : pour moitié il est tout neuf. Ce sont de très beaux magasins, entretenus et équipés, avec du personnel de qualité. Cela peut être un effet accélérateur pour un opérateur notamment étranger, mais à ce stade, toutes les options sont ouvertes.
Mayday : Il y a quelques mois, les rumeurs d’un PSE avait été entendues. Est-ce qu’ un projet de PSE accompagne cette cession ?
PHC : Non, il y avait eu un projet de PSE qui avait été étudié avant que j’arrive. Je l’ai annulé. Pour mettre en place un PSE, il faudrait supprimer des points de vente, ce qui n’est pas notre cas aujourd’hui.
Par Cyprien de Girval